Une personne m’a posé cette question : faut-il pardonner ? Voici quelques éléments de ma réflexion.
Pardonner est une décision d’adulte, même si beaucoup d’enfants pardonnent, souvent, énormément… Mais je parlerai ici du pardon d’adulte à adulte. Il n’y a, pour moi, aucune obligation. On peut trouver une paix intérieure après avoir pardonné, mais il y a des conditions qui nous permettent de le faire.
Quelles sont les conditions
qui permettent de pardonner ?
– Il faut que ce que l’on perçoit comme nous agressant, nous heurtant, ait cessé.
Certaines personnes parviennent à le faire pourtant, mais je pense que c’est lorsque les agressions sont mineures, qu’elles n’atteignent pas notre intégrité. Lorsque notre intégrité est en jeu, il faut que l’agression n’ait plus lieu. Pardonner en restant sous le feu de critiques, ou dans une situation injuste, par exemple, ou encore exposé à une possible agression physique, est très difficile.
– Il faut que cette décision soit libre. Or, l’une des conditions de la liberté, c’est la possibilité de se séparer de la personne qui a agressé, si je puis dire, et de se séparer en étant en sécurité. Si vous pouvez vivre sans avoir besoin de la personne qui vous a agressé, si vous vous sentez psychologiquement et matériellement capable de vous séparer – mais sans être obligé(e) de le faire – alors la décision de pardonner est libre.
– Il faut le souhaiter. Cela paraît une évidence, mais souvent, pour souhaiter pardonner, on a besoin d’être guéri des blessures reçues.
Néanmoins ce n’est pas toujours le cas. Certaines personnes peuvent décider, d’un point de vue adulte, qu’elles pardonnent, sans avoir encore guéri de leurs blessures psychologiques passées. Il faut en effet parfois du temps pour guérir, et nous pouvons souhaiter avoir des rapports adultes apaisés avant d’y être parvenu. On peut alors, en parallèle au pardon, guérir l’enfant que nous avons été et qui a souffert – cela peut être l’adolescent(e) ou nous-même dans un passé plus récent.
Le travail de guérison de ce qui a été douloureusement vécu ne concerne alors plus la personne qui nous a fait mal, mais avant tout nous-même.
– Ce qui aide à pardonner, c’est de parvenir à considérer le point de vue de l’autre, comprendre ce qui l’a amené à nous faire mal.
Au fait, pourquoi pardonner ?
Souvent, c’est pour s’apaiser soi-même. Cela peut-être une volonté de lâcher-prise. A quoi bon garder de la colère, si l’on n’est plus dans la situation qui fait souffrir, si l’on en a réparé les conséquences ?
Cette colère peut d’ailleurs se transformer en rancœur ou en amertume si elle ne trouve pas son utilité (je reparlerai de l’utilité d’une émotion).
Garder de la colère, c’est dépenser de l’énergie pour la contenir. On préfère toujours être en paix et utiliser notre énergie à vivre des choses agréables. C’est une écologie spontanée.
Le pardon n’est pas obligatoire
Certaines personnes disent ne pas vouloir pardonner. En effet :
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si on a eu trop mal, si l’on a été tellement dévasté(e) que l’on peine à s’en remettre,
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si l’on n’a plus de lien avec la ou les personnes concernées ;
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et si la personne ne montre, de plus, aucun désir d’être pardonné(e),
alors à quoi bon ?
Pardonner, c’est s’occuper de l’autre. Si l’autre est plus vulnérable et si nous avons assez d’énergie : pourquoi pas ? Mais à condition de pouvoir nous occuper d’abord de nous-même. Notre première responsabilité, c’est de prendre soin de nous-même. Ensuite, des autres.
D’abord se pardonner à soi-même ?
Mon expérience de thérapeute m’a montré qu’on a également besoin de se pardonner à soi-même. Peter Levine l’explique par le fait que dans la situation où nous recevons une agression, nous intégrons, même pour un court instant, que nous sommes en situation d’impuissance, que nous ne faisons rien pour protéger notre intégrité. Nous pouvons nous en vouloir, après-coup, de n’avoir rien fait ; nous nous sentons coupables de notre impuissance. Plus la situation a duré longtemps, plus ce sentiment de culpabilité (ressentiment retourné contre soi) est fort.
Comme pour toutes les émotions persistantes, je propose aux clients de travailler cela en EFT, et c’est un sentiment qui se dissout peu à peu. En se concentrant sur cette émotion négative grâce à cette technique, la perception s’élargit : la personne, dans son corps, ses pensées intègre finalement qu’elle n’a pu faire autrement, qu’elle est désormais en sécurité, et qu’elle peut passer à autre chose. Ce autre chose varie toujours selon chaque personne, évidemment.
Avant de pardonner aux autres, on a donc souvent besoin d’être bien au clair avec ses propres sentiments.
Et vous, avez-vous eu déjà envie de pardonner, sans pouvoir le faire ? Ou au contraire, pardonnez-vous facilement ? Qu’est-ce qui vous aide à le faire ?
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Delphine
Bonjour ,
c’est une question très profonde, la question du pardon. Personnellement j’ai vécu il y a quelques années une grande trahison de la part de ma meilleure amie. Il m’a fallu du temps et un travail sur moi pour pouvoir passer à autre chose. Je n’aime pas trop le terme pardon qui donne l’impression que l’un (celui qui pardonne) se place au dessus de l’autre (celui qui est pardonné) en lui donnant un consentement sur ses actes, bref je préfère le terme acceptation.
J’ai réussi à accepter le comportement de mon ex meilleure amie le jour où j’ai accepté 2 choses :
1. que chaque personne fait du mieux qu’elle peut en fonction de ce qu’elle a appris dans sa vie, de son éducation, de ces expériences de vie qui l’ont construit et qui lui font aujourd’hui avoir ces attitudes là, même si elles ne sont pas correctes . Avec le recul on se rend compte que chaque personne a toujours une bonne raison d’agir comme elle agit (elle ne sait pas faire autrement, par peur, etc..) et c’est toujours lié à un passé, forcément pas toujours rose qui lui font être aujourd’hui une personne pas toujours rose
2. que j’avais moi aussi été responsable de ce comportement. parce que dans une relation on est toujours plusieurs, en l’occurrence ici on est deux, et que l’un agissant en fonction de ce que l’autre fait, les actes sont donc toujours liés.
Pour m’expliquer plus clairement, si une personne prend le pouvoir sur l’autre en agissant de manière malsaine, c’est aussi parce que l’autre lui a laissé cette place en étant plus effacé, en évitant de faire des histoires par exemple. On est responsable des personnes qu’on laisse entrer dans nos vies, on est responsable de la place qu’on leur attribue, on est responsable de ne pas toujours voir la vérité. C’est dur à accepter cette responsabilité mais pourtant elle m’a permis moi de sortir de la colère contre cette personne et d’accepter que nous avons fait du mieux que nous avons pu à ce moment là de notre vie.
cette expérience m’a fait beaucoup de mal et pourtant quelques années après j’ai eu envie de lui dire merci parce que grâce à cette trahison j’ai rencontré des psy, j’ai fait un travail sur moi, j’ai tellement appris sur moi que ma vie a été complètement chamboulée, en mieux 😉 et aujourd’hui je sais que c’est cette trahison qui a été le point de départ !
Valérie JOUBERT
Bonjour Delphine,
Je trouve l’idée d’utiliser le mot « accepter » plutôt que « pardonner » très intéressante, même si pour beaucoup de personnes le pardon n’est pas vécu comme donné « d’en haut ». Mais c’est important de le mentionner. Parce que se placer « au-dessus » dénote sans doute aussi de la colère, de la part de celui ou celle qui pardonne (ou accepte), ou en tous cas traduit, je crois, une relation qui n’est pas dans la simplicité de l’égalité.
Quant à la responsabilité, c’est juste… mais c’est à discuter, notamment par rapport aux proportions et aux conséquences que cette idée peut amener. J’ai d’ailleurs prévu un article sur le sujet. Donc à bientôt j’espère !