De l’humour le plus léger à la moquerie, voire la raillerie, en passant par la taquinerie, l’humour est toujours une prise de distance par rapport à ce dont on parle.
Freud a écrit : là où il y a humour, il y a conflit. Je suis d’accord !
L’humour le plus léger permet de prendre du recul. Dès que nous l’utilisons, c’est que nous sommes en train de regarder une situation. Et de la regarder d’une certaine manière.
L’humour, ce n’est pas de la joie. Vous pouvez le sentir dans votre corps. Quand vous êtes dans la joie, vous êtes complètement ouvert, en mouvement. Quand vous avez ne serait-ce qu’une pointe d’humour, c’est en lien avec une tension, si minime soit-elle.
Ce n’est pas non plus la paix. Dans la paix, vous pouvez tout embrasser dans votre perception, et vous êtes dans la sérénité. Et dans le corps, vous pouvez aussi sentir la différence : la paix c’est l’ouverture, dans le relâchement complet. L’humour apporte du mouvement et un peu de tension.
L’humour, poussé plus loin, peut servir à rejeter. La moquerie repousse, rejette. Plus loin encore dans le rejet : la raillerie, le sarcasme, la dérision : ici on dévalorise.
Pourquoi la moquerie ?
On rejette quand on se sent – bien souvent inconsciemment – impuissant dans une situation qui nous déplaît. La moquerie est utilisée par la personne qui ne se sent pas en sécurité et qui ne peut poser ses limites ou faire changer une situation. Elle utilise alors ce moyen : elle attaque pour défendre son intégrité.
Et les gens qui se moquent gratuitement ? C’est souvent un modèle qu’ils ont imité, et intégré : « dans ma famille, on se moque, on se charrie, on se met en boîte, c’est normal ». Les personnes qui ont vécu cela depuis leur enfance ne voient pas le problème. Mais souvent, dans leur vie, elles ne peuvent pas se livrer dans toute leur vérité, parce qu’elles ne se sentent pas en sécurité : en effet, être exposé à la moquerie oblige à se protéger et donc à cacher les aspects de soi qui pourraient être attaquées. Lorsqu’on grandit avec cela, on le « trimballe » avec soi.
Passer son temps à se protéger
Lorsqu’on est adulte, vivre avec des personnes qui se moquent aboutit au même résultat : on n’ose pas montrer tel ou tel aspect de sa personnalité pour éviter des « piques », petites ou grandes, qui empêchent que l’on se relâche. Ce n’est pas bon pour la santé de se faire agresser, inutile de le dire. Spontanément, on essaie donc d’éviter les attaques, de s’en protéger ou de les repousser quand on en subit quand même ; il faut ensuite réparer les « bleus » psychologiques. Tout cela demande de l’énergie et du temps, que l’on pourrait utiliser bien plus agréablement à développer ses qualités, ses compétences.
Dans les pays de dictature, vous l’avez peut-être remarqué, on se moque souvent des puissants. Les plaisanteries circulent dans la sphère privée et cela permet de soulager la tension d’être soumis à un cruel manque de liberté.
Mais lorsque les personnes ont la liberté de s’exprimer, d’agir, de négocier, elles n’ont plus besoin de se moquer : le lien avec l’autre est rétabli parce que leur existence est reconnue.
Et la taquinerie ?
La taquinerie n’en est une que si elle est vraiment acceptée par celui qu’on taquine, si ce n’est pas de la dévalorisation ni du rejet. Et si le lien d’affection est vraiment là, si les personnes sont dans une vraie relation de confiance, c’est une taquinerie. Mais c’est comme pour les chatouilles : sous des allures « gentilles », cela peut devenir une agression.
Alors ne vous moquez pas… pour commencer, pas des personnes plus faibles que vous… et au premier chef les enfants. Et si vous avez quand même envie de vous moquer, demandez-vous ce qui se passe en vous. Est-ce une situation injuste, pénible ? Est-ce simplement une habitude ? Avez-vour peur de vous montrer trop sensible ? Ou est-ce en vous ce que Carl Jung appelait l’Ombre, cette partie de nous-même que nous n’aimons pas mais que nous projetons sur les autres ? J’y reviendrai.
Humour pour tous !-))
Mais on peut sourire, rire, rigoler, se taper sur les cuisses et se tenir les côtes… à corps perdu ! On peut savourer la vie sans attaquer la sensibilité des autres – et la sienne.
L’humour peut rassembler parce qu’il nous met en contact : il permet de partager une même perception. Marc Lavoine, mon professeur de sociologie, nous rappelait que l’humour suppose un univers commun de références. On peut rire parce qu’on est tous perchés sur le même promontoire pour voir la situation, on comprend ce qui est drôle pour les autres, on rit ensemble – et il faut parfois « expliquer » ce qui est drôle à des personnes qui n’ont pas le même vécu, que ce soit au niveau de membres d’une famille ou à l’échelle de différents pays. Cela peut détendre une atmosphère, produire des endorphines. L’humour, ça peut donc évidemment être bon pour la santé. Alors sans moquerie, sans raillerie, sans dévalorisation : humour pour tous, et du bon !
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balmon
Merci pour ce billet, très intéressant. L’humour est trop souvent admis comme étant positif, trop souvent aussi parce-que le mot est utilisé pour rendre compte de tant de formes différentes. Auriez-vous quelques pistes de lecture ?
Valérie JOUBERT
Bonjour, ce que j’ai écrit vient de ma propre observation, et je n’ai pas de pistes de lecture en tête. Mais je vais y réfléchir !
de villenaut Aubine
‘Je suis bien d accord sur la taquinerie. Cela en est une s il y a confiance. Je prends les taquineries comme des attaques. Mon compagnon m appelle la vieille et je suis en surpoids, il me taquine dessus alors que je suis très sensible sur cela. Pas evident à vivre ni pour lui ni pour moi.
Catherine
Il n’y a pas de taquinerie sur le poids. À mon avis, votre compagnon a envie que vous perdiez du poids, ça le dérange
Valérie JOUBERT
Apparemment, Catherine, le compagnon d’Aubine la taquine effectivement sur son poids (« je suis en surpoids, il me taquine dessus »). Si le compagnon est dérangé par son surpoids, il est préférable qu’il parle de ce que cela lui fait à lui, de pourquoi cela le dérange, de manière directe mais aussi respectueuse.
Il pourrait aussi écouter ce qu’Aubine en dit à son tour, puisqu’apparemment elle est également gênée de ce surpoids.
La taquinerie, dans ce cas-là, peut évidemment être une manière, pour son compagnon, de ne pas oser dire les choses, pour ne pas la blesser : mais paradoxalement, on peut au contraire davantage faire mal en disant les choses indirectement. En parlant de soi et de ses sentiments, et en écoutant ce que l’autre ressent, le lien se rétablit dans le dialogue.
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